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MIEUX VAUT MARCHER

d’élite rassemblés par Fut-Zée dans le Chi-King, le troisième des Cinq Classiques. Vêtu d’habits très-simples, usant d’une nourriture frugale, mais toujours dans l’aisance et le contentement, il possédait encore du superflu, malgré la modicité de sa fortune, et savait venir au secours des pauvres du village. Aussi le comparait-on à un Printemps mâle pourvu de pieds.

Il avait pour voisin un fermier, non des plus riches, et qui se distinguait seulement par son grand amour pour l’horticulture. Dans son vaste jardin, fermé par des treillages de bambous, il réunissait l’althœa, la balsamine, la ketmie aux fleurs changeantes, la pivoine en arbre, l’amaranthe, le lychnis couronné, le calycanthe, le corchorus, le bouton d’or, et beaucoup d’autres plantes non moins rares. Depuis longtemps, cet honnête homme, surnommé dans le pays le Fou des Fleurs (Hoa-Tchy), nourrissait le désir secret d’entendre réciter des vers par Hou-Kong.

On voit dans le livre des Dix mille Mots que :

Celui qui chante est une incarnation de Bouddha,
Du Dieu qui répand l’or et t’abondance.

En conséquence, un jour que l’occasion lui parut favorable, le Hoa-Tchy mit ses habits de nouvel an, et alla frapper à la porte de son voisin.

Celui-ci était sous ses arbres, occupé à chanter et à boire du vin de Niao-Tching dans une tasse d’or, présent du vice-roi de la province. Près de lui était une table portant un vase de porcelaine du milieu duquel s’élevait une branche de pêcher couverte de belles fleurs marbrées. À l’aspect de son voisin que lui amenait un serviteur, il