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LES PROVERBES VENGÉS.

on applaudit. – C’est moi, dit à demi-voix un vieillard en habit de brahmane, caché dans l’ombre, qui suis le véritable auteur de cette vive et brillante comédie ; moi, qui ne suis pourtant qu’un pauvre vieux proverbe qu’on appelle :

la fortune vient en dormant.

Au même instant, une divinité descend sur un nuage ; c’est la Vérité. Elle ouvre un livre d’or, qui n’est autre que le livre des proverbes, et elle trace au premier feuillet cette phrase au milieu de tant d’autres du même genre que Rabelais, Cervantes, La Fontaine, Molière, Boileau, Sterne, Lesage, n’ont pas dédaigné d’inscrire de leur propre main dans ce registre immortel.

Je renonce, Mesdames, à vous décrire toutes les scènes drôlatiques, mythiques, allégoriques, comiques, satiriques ou même pastorales, que représentèrent successivement les étranges magiciens qui s’étaient tout à coup emparés du parc et du château. Mais je vous laisse à deviner quel fut l’étonnement des personnes que nous avons vues dans le milieu du jour réunies sur la pelouse et accablées d’un si mortel ennui, lorsqu’à leur réveil elles se trouvèrent transportées, comme par enchantement, dans le château, et se virent revêtues d’habits de théâtre, poudrées, fardées, prêtes enfin à figurer dans toute espèce de comédies.

On entendit aussitôt sonner une cloche, mais qui, cette fois, n’avait rien de diabolique ; – c’était la cloche du dîner. On passa dans la salle à manger ; une porte à deux battants s’ouvrit, et on aperçut une galerie où se trouvait un théâtre qui avait dû être improvisé en moins de quelques heures. Le rideau se leva, et on vit s’avancer, en costume de