Page:Grave - La Société future.djvu/275

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Et que l’on ne crie pas à l’utopie, à l’invraisemblance, en prenant pour exemple les associations actuelles ; la situation ne serait pas la même ; l’individu de demain ne sera nullement comparable à celui d’aujourd’hui ; il aura d’abord évolué, déjà pour arriver à comprendre notre idéal et avoir su se créer un milieu qui lui permette de l’essayer ; l’organisation sociale ensuite étant changée, cela doit amener un changement de mœurs. L’influence des milieux est une loi naturelle qui fait partout ressentir ses effets.

Toutes les associations sont autoritaires et individualistes aujourd’hui. Si l’association est nombreuse, — souvent cela n’est même pas nécessaire — il y a, parmi les associés, des distinctions d’emplois, de grades et de salaires, l’un comportant l’autre, du reste actuellement, il y a aussi des questions de préséance. L’intérêt du groupe qui devrait être le mobile de tous passe au second rang, car en dehors de ce groupement, il y a la grande société qui divise les intérêts et pousse chaque individu à satisfaire son intérêt par un bien présent, au détriment de ses voisins, au risque d’un mal futur, et il arrive que dans l’intérêt commun, il se taille une foule d’intérêts particuliers.

Malgré ces causes de désunion, malgré le choc de ses appétits contraires, l’accord se maintient généralement assez longtemps ; la zizanie ne s’y met que lorsqu’un ou plusieurs des associés plus roublards que les autres, se mettent à tromper leurs coassociés pour s’en faire confier la direction de l’association et la font alors marcher selon leurs intérêts privés, jusqu’à ce qu’ils réussissent à exproprier leurs camarades et à en rester les seuls maîtres.