Page:Grave - La Société future.djvu/320

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pourvu que le spectacle de ces souffrances ne s’étale pas immédiatement sous ses yeux.

Pourtant, malgré cela, l’homme pris en général souffre de voir souffrir son semblable ; une misère qui frappera ses regards le troublera dans sa jouissance. Il se plaît à secourir son semblable, lorsqu’il peut le faire sans compromettre son bénéfice ou ses chances de réussite. Certains peuvent bien ne le faire que par ostentation, mais cette ostentation même, prouve que cela est bien vu de la généralité des individus.

C’est au nom de la société, — c’est-à-dire pour le bien de tous — que l’individu accepte les entraves et l’exploitation actuelles que la force seule serait impuissante à maintenir. En admettant qu’il entrât dans ce respect une part de la peur des gendarmes, quel est le bénéfice qu’en tirent les sans le sou, eux qui fournissent la force et n’ont rien à défendre ? Ne sont-ce pas eux qui fournissent les gendarmes ?

Ne voit-on pas dans des cas exceptionnels, des individus sacrifier, bien-être, existence, pour des causes d’intérêt général : science, patrie, amour de l’humanité, pour le triomphe de leurs seules idées particulières ? L’exemple d’amis risquant leur vie, leur situation ou leur liberté, pour être utiles à un ami, est-il si rare ? Certes, la bourgeoisie actuelle avec ses tripotages, son amour du lucre, les chantages et les trahisons, qu’elle semble avoir mis à l’ordre du jour, semblerait nous prouver l’avachissement de l’humanité, mais elle n’est heureusement que la minorité, et tous dans la bourgeoisie ne sont pas non plus des politiciens.