Page:Grave - La Société future.djvu/387

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connaisse dès son plus jeune âge le rameau et la branche dont il fait partie, et qui ne vante avec orgueil la force ou le nombre de cette section de son peuple. D’ailleurs c’est dans cette section qu’il trouve toujours une protection contre la violence arbitraire des membres des autres clans ; car la tribu entière, s’il a été fait tort à l’un de ses enfants, doit en poursuivre la réparation[1]. »


Et plus loin :


« Les nomades qui habitent cet endroit sont venus en foule visiter la caravane. Une sorte de négoce s’est établi ; j’ai vu se conclure à crédit, des ventes et des achats d’une certaine importance. La rédaction des lettres de change, et surtout leur transcription, m’a été naturellement dévolue. Il m’a paru assez surprenant que le débiteur, au lieu de remettre sa signature au créancier, garde lui-même le titre de sa dette au fond de sa poche ; c’est pourtant ainsi que se font les affaires dans tout le pays. Un créancier, que je questionnais sur cette manière de procéder si contraire à nos habitudes, me répondit avec une simplicité parfaite : « Pourquoi conserverais-je cet écrit, et à quoi me servirait-il ? Le débiteur au contraire en a besoin, pour se rappeler l’échéance de la dette et le chiffre de la somme qu’il s’est obligé à me restituer[2]. »


Ainsi voilà des pillards qui nous donneraient l’exemple de la bonne foi et du respect de la parole jurée ! Mais les négociations de notre société actuelle,

  1. A. VAMBÉRY, Voyages d’un faux Derviche, édition abrégée, pp. 38-39.
  2. A. VAMBÉRY. Id. p. 91.