Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T1.djvu/172

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dépassassent celles de la vièle, attendu qu’avec la disposition de cet accord, si elle montait moins dans l’aigu, elle ne descendait pas non plus autant dans le grave que celle dernière. De sorte que, par suite de ce fait, il n’y aurait rien d’impossible à ce que la rubèbe fût la plus petite des deux.

II

Aymeric de Peyrac, poêle du xiiie siècle, qui se sert un des premiers, du mot rebec pour désigner la rubèbe, dit que cet instrument rendait des sons aigus imitant les voix de femmes :

Quidam rebecam arcuabant,
Quasi muliebrem vocem configenles[1].

Gerson, un autre auteur de la même époque, expliquant les paroles du psaume Laudate eum in chordis et organo, établit aussi que la rubèbe était plus petite que la vièle[2].

Tous ces textes ont jeté le doute dans l’esprit de nos modernes musicographes et fait naître des opinions diverses : — « Comment, dit Coussemaker, expliquer cette contradiction ? Faut-il admettre que l’accord enseigné par Jérôme de Moravie doive être haussé d’une octave ? Cela ne paraît guère vraisemblable[3] » — Kastner n’est pas moins indécis : « La différence de ces témoignages, dit-il, ferait supposer que le rebec et la rubèbe, dans le siècle où vivaient les deux écrivains précités (Jérôme de Moravie et Aymeric de Peyrac), c’est-à-dire dans le xiiie n’étaient peut-être pas des instruments tout à fait identiques, mais deux variétés de l’espèce. » Et parlant de Gerson : « Cependant, il ne paraît pas que

  1. Rapporté par du Cange.
  2. Tractatus de canticis (Gerbert, De cantu, t. II, p. 154 et suiv.).
  3. Essai, ouvrage déjà cité.