Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T1.djvu/78

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du précédent chapitre, qu’elle ait été inspirée à la fois du crouth et de la lyra, que l’on ait appliqué les principes du premier à la seconde, pour l’obtenir, on devrait encore lui donner la même origine, car elle aurait, dans ce cas, bien plus emprunté au crouth qu’à la lyra. Mais comme ce sont les principes de construction qui caractérisent un instrument et non sa dimension plus ou moins grande, ni le dessin de ses contours, en réalité, la vièle à archet n’était donc pas autre chose qu’un dessus de crouth à manche dégagé.

Nous avons déjà expliqué, en parlant du crouth, qu’un instrument était dans l’obligation d’avoir un manche indépendant lorsqu’il possédait un certain nombre de cordes, et cela, pour permettre aux doigts de les toucher toutes. Nous n’y reviendrons pas, puisque la vièle était régulièrement montée de cinq cordes, ainsi qu’en font foi les textes d’Élie Salomon et de Jérôme de Moravie, et comme le montrent la plupart de ses reproductions. Mais nous ajouterons que le fond plat était également d’une grande nécessité pour la vièle, non seulement parce qu’elle aurait été plus difficile à tenir, soit sous le menton, ou bien appuyée contre la poitrine si le fond en avait été bombé ; mais encore parce que son manche fixé à un des bouts de la caisse ne permettait guère de la construire autrement qu’avec un fond plat et des éclisses.

Tout porte à croire que l’art de la lutherie n’était pas très avancé dans ce temps-là, et si ces vers suivants du Roman d’Alexandre :

Li uns tiennent une vièle, l’arçon fu de saphir ;
Et l’autre une harpe, moult fu boine à oir.


nous montrent que la vièle, l’instrument artistique de l’époque, possédait parfois des ornements d’une grande richesse, il est de toute probabilité qu’on la construisait, le plus souvent, d’une façon assez sommaire, tout simplement d’un seul morceau de bois creusé ou bien de deux :