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LE COIN S’INTRODUIT

— Derrière ce mirage, faisons poindre la vérité, se disait le Père Fabien, et l’illusion s’évanouira.

Il aiguilla donc son dirigé vers la culture française, et même vers la grande littérature classique. C’est René Johannet qui a écrit : « Les classiques français sont ainsi faits qu’il ne convient jamais de désespérer d’un homme de culture, pas plus qu’il ne convient de désespérer du salut de la culture française ». Dans le cas de Lantagnac le tonique intellectuel agit vigoureusement. Chaque quinzaine en dépliant sa serviette pour remettre au Père Fabien les volumes empruntés, l’avocat parlait avec enthousiasme de ses lectures, de l’effet prodigieux qu’elles produisaient sur lui. Un jour paraissant plus ému que d’habitude, il dit au religieux :

— C’est étrange, depuis que je me refrancise, je sens en tout mon être une vibration harmonieuse ; je ressemble à l’instrument de musique que l’on vient d’accorder. Mais à d’autres moments, vous le dirai-je ? je ne sais quelle nostalgie, quelle inexprimable tristesse m’envahit. À quoi bon vous le cacher ? Un être demi-mort se remue en moi et demande à revivre. J’ai la nostalgie de mon village, de la maison paternelle que je croyais avoir oubliés, que je n’ai pas revus depuis vingt ans.

— Il faudra les revoir, tout simplement, lui avait proposé le Père Fabien.

Lantagnac hésitait quelque peu à entreprendre ce voyage. Là-bas qui trouverait-il