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À LA RECHERCHE DU DEVOIR

Puis, il revint ; et ses yeux dans les yeux de son pénitent, il reprit :

— Mon ami, il y a ici un conflit entre deux obligations ; je cherche laquelle doit l’emporter. Un devoir de charité et aussi de justice sociale vous lie incontestablement à votre famille. Un devoir de charité et aussi de justice sociale vous lie de même envers vos compatriotes, de par votre qualité de député. Par certains côtés, ce débat du 11 mai n’est qu’une manifestation plus solennelle que d’autres, une offensive importante mais qui ne finira point la guerre. Et, certes, de ce point de vue, rien n’est assez grave pour vous commander une intervention avec de si cruelles conséquences. D’autre part, l’abstention du député de Russell peut-elle, oui ou non, compromettre le résultat final de la guerre ? Nous voici au nœud suprême. Je songe que, devant le public, trop peu au fait de bien des circonstances, je songe qu’après l’incident de son fils William au Loyola, Jules de Lantagnac ne peut garder le silence demain, sans se déshonorer à jamais, sans ruiner le prestige d’un grand talent. En ce cas, a-t-il le droit, lui qui est chef, qui est investi, devant les siens, d’une sorte de souveraineté morale, a-t-il le droit d’annihiler son influence pour le bien ? Je songe ensuite que son abstention ne peut être qu’un sujet de scandale, une tentation de défaitisme pour la masse de ce pauvre peuple qui lutte si péniblement depuis six ans. Oh ! je l’entends trop la triste exclamation qui