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DANS LA GRANDE ARÈNE

échauffée par la vivacité grandissante du débat, l’avait ensuite poussé d’elle-même à un acte de courage. Enfin l’appel des siens, des persécutés de sa race et de sa province, montait autour de lui, frémissant et impérieux, pendant que se déroulaient leurs griefs et leurs douleurs. Toutes ces pensées, tous ces sentiments s’étaient encore accrus d’intensité, quand avaient parlé les doctri naires de l’anglicisation, les ennemis de mauvaise foi. Dès ce moment, Lantagnac entrevit qu’il lui serait impossible de rester cloué à son siège. Pouvait-il, lui, le représentant de la minorité outragée, pouvait-il, lui présent, laisser passer, sans protestation, tant d’allégations fallacieuses ? Presque aussitôt lui étaient revenus les souvenirs de ses méditations de la veille sur la colline parlementaire, les directives précises rapportées de Hull, sa méditation du matin à l’église Sainte-Anne ; et toutes ces clartés avaient achevé de redresser sa volonté cornélienne, incapable d’agir contre la lumière. Pourtant l’orateur s’en souvenait : au dernier moment, quelque chose comme un fluide mystérieux l’avait agité. Il avait cru y reconnaître ces secousses extraordinaires dont lui avait parlé le Père Fabien, illuminations et motions souveraines de l’Esprit qui soulèvent au-dessus d’elle-même la volonté de l’homme. En moins d’un instant l’homme s’était trouvé debout ; il avait commencé de parler.

Son discours, par bonheur, ne se ressentait mullement de la soudaineté de l’improvisation. Le