Page:Groulx - L'appel de la race, 1923.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
260
L’APPEL DE LA RACE

— Comme vous avez songé aux vôtres, mon ami, répliqua-t-elle.

Lantagnac frémit devant cette amertume. Vraiment éploré, il risqua pourtant une dernière question :

— Me laisserez-vous au moins quelqu’un de mes enfants ?

— Je respecterai leur liberté, répondit Maud avec hauteur. Je n’emmènerai avec moi, vous pouvez en être sûr, que ceux-là seuls qui auront choisi de me suivre.

L’entretien fut clos sur ce dernier mot que Madame prononça en se levant pour sortir. Lantagnac qui connaissait le caractère cassant, effroyablement impérieux de Maud, ne fit rien pour la retenir.

Hélas ! quels seraient les jours qui allaient venir ! Le pauvre mari dut assister, silencieux, sans y participer, aux préparatifs de la séparation. Du fond de son cabinet de travail où il s’enfermait, dès son arrivée chez lui, il entendait dans les chambres et les couloirs, le bruit des meubles qu’on emportait, et, dans les escaliers, la descente des malles et des objets emballés. Chacun de ces bruits résonnait dans son cœur, comme le choc d’un marteau à l’intérieur d’un tombeau. Une image de tristesse le hantait, le poursuivait partout : celle de la dispersion de ses enfants, de son effroyable solitude à l’avenir.

— À part Virginia, se disait-il, qui donc va me rester ?