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L’APPEL DE LA RACE

phrase de la symphonie patriotique, au loin les larges échos la reprenaient, l’harmonisaient sur leur clavecin, la magnifiaient sur un rythme grandiose. Des orgues géantes s’ébranlaient, en vastes crescendos, le long des escarpements hautains ; et il semblait, dans la résonance de toute chose qui emplissait l’air, que l’hymne national fût l’acclamation naturelle, le chant inné de la terre canadienne.

Les enfants étaient émerveillés. Ils ne le furent pas moins du spectacle qui s’offrit bientôt à leurs yeux, pendant que lentement les promeneurs reprenaient la route de la villa. La nature sauvage des Laurentides s’étalait, ce soir-là, dans le calme impressionnant d’une belle nuit d’été. Le silence s’était fait sur le lac et dans les hautes futaies. À peine croyait-on percevoir, en écoutant bien, la vibration mystérieuse du fourmillement immense de la vie sur le revêtement de granit des altitudes. Parfois, à de rares intervalles, un chœur de bois-pourris, la flûte aiguë du huard s’élevaient au fond des baies, mais pour s’éteindre aussitôt et agrandir le silence. La chaloupe glissait à peine sur le calme de l’eau noire et profonde. Par moments l’on traversait des zones d’air chaud, respiration douce et moite du lac qu’une odeur de résine mouillée par le serein, souffle venu de la terre, tempérait aussitôt. Sur le flanc de la montagne un petit défriché apparut. Au centre, une maisonnette blanche dormait du sommeil lourd qui suit les rudes