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L’APPEL DE LA RACE

— Parfaitement. Très agaçant, et très ridicule, s’écria Virginia qui s’échauffait à son tour. Seulement, le serait-ce autant, mon cher oncle, si ces petits héros, au lieu d’être des petits Canadiens français d’Ontario, étaient tout bonnement des petits Anglais de la province de Québec, en guerre, eux aussi, contre un Règlement XVII prescripteur de la langue anglaise ? Ou encore, si vous le préférez, que dirait l’oncle William, si au lieu d’être les enfants des pauvres habitants de Prescott ou de Renfrew, ces petits grévistes étaient ceux du grand avocat William Duffin, défendant la langue de leur père ?

L’argument surprit un peu l’Irlandais. Il n’osa l’aborder de front. Il se contenta de répliquer :

— S’il s’agissait des enfants de William Duffin, William Duffin commencerait par leur apprendre le respect des lois de leur province. Pour le moment nous sommes en Ontario. Ontario est un pays anglais. Que cette marmaille n’apprend-elle la langue du pays ?

Cette riposte plut visiblement à madame de Lantagnac et à Nellie. Ni l’une ni l’autre ne prenaient part à la discussion. Mais il ne put échapper à Lantagnac que sa femme et sa fille aînée, à chacune des charges de Duffin, réprimaient difficilement une vive satisfaction. Lui, il s’était contenu jusqu’ici. À tout prix, il voulait éviter un éclat qui froisserait inutilement sa femme. Pourtant, à mesure que le débat s’avançait, il