Page:Groulx - Louis Riel et les événements de la Rivière-Rouge en 1869-1870, 1944.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

là simplement mon opinion, mais aussi l’opinion que m’ont exprimée certains membres de l’ancien gouvernement ». Sir John-A. MacDonald faisait cette confidence au même Comité : « Je sentais que si le gouvernement britannique accordait une amnistie, qu’elle serait loyalement acceptée par la population, tandis que si le gouvernement canadien prenait la responsabilité de la demande, que cet acte serait vu d’un très mauvais œil par la population, en tout cas celle de l’Ontario ». Disons les choses comme il faut les dire et comme l’histoire impartiale a commencé de les dire : Riel fut livré à ses ennemis contre toute justice humaine et contre toute justice britannique. Il fut sacrifié à un mouvement d’opinion longuement exalté et à ce que l’on croyait peut-être, dans les milieux gouvernementaux, la raison d’État, mais qui n’était que l’immorale ambition du pouvoir et l’intérêt encore plus immoral des partis politiques. On disait autrefois : « Il vaut mieux qu’un homme meure plutôt que la nation ». On a dit : « Il vaut mieux qu’un homme meure plutôt que le parti ! » Là-dessus Hector Langevin, entre quelques autres, s’est chargé de nous enlever tout doute quand il confiait à l’abbé Ritchot que « pas un gouvernement ne pourrait se maintenir cinq minutes s’il se saisissait de cette question et que le gouvernement dont il faisait partie, n’était pas tenu de se suicider ». Pour le moins, c’est d’un politique réaliste.

— IV —

L’homme est un apprenti — La douleur est son maître, a dit le poète. Rien comme l’épreuve, on le sait, pour prendre la mesure des hommes. Il y en a qu’elle abat et rapetisse ; il en est d’autres qu’elle grandit. Dans ce drame politique où tant de personnages s’appliquent à se diminuer, la figure du jeune chef Métis se détache avec une singulière noblesse. À mesure que le malheur s’acharne contre lui, cet homme d’esprit naturellement élevé, prend de l’altitude. Loyal à son pays, il le restera malgré toutes les séductions, en dépit de toutes les avanies dont on aura soin de l’abreuver. Pour livrer l’Ouest à des autorités d’outre-