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mes mémoires

éducation vraiment chrétienne ?, je réponds du tic au tac : « Être ce que l’on doit être, et l’être intégralement. Vous êtes catholiques : l’être excellemment, de la plante des pieds à la pointe des cheveux. Vous êtes scouts, une espèce particulière de jeunes catholiques : scouts, l’être dans la perfection de votre foi, selon toutes les exigences de votre institution. Être quelqu’un ! C’est ainsi qu’on rayonne, qu’on est dynamique… Ce n’est pas en prêchant que les scouts sont vraiment des scouts, mais en étant de jeunes catholiques qui mettent leur âme au premier plan… Donc, avant tout, être un grand exemple, faire voir qu’il peut y avoir des jeunes qui se conduisent avec grandeur et dignité. »

Fort mêlés aux scouts anglophones, ces jeunes gens ne manquent point d’aborder l’enseignement de l’Histoire. La question est vieille, mais quelle génération ne la ramène point et presque à tous les cinq ou dix ans ? Nos politiciens, je le répète, par leur bonasse bonne-ententisme, ont réussi à nous donner mauvaise conscience dans les divisions qui sévissent au Canada. N’en serions-nous point, pour une part, grandement responsables, sinon les premiers et les plus gravement responsables ? Et, en l’affaire, quelle responsabilité ne pas attribuer à notre histoire ? Nos petits scouts ont ramassé quelque part l’impérissable rengaine. Nos historiens s’en mêlent. L’on en revient ou presque à la Conquête anglaise « bienfait providentiel » : nul dérangement, même régime monarchique, même régime colonial, mêmes cadres politiques, économiques, sociaux, etc. L’on n’oublie qu’une chose et c’est qu’en ces cadres nous ne jouions que le petit rôle, pour ne pas dire le rôle de valet et que, jusqu’à l’union des Canadas et même au-delà, nous serons en fait gouvernés par une minorité anglaise. Hélas ! aveuglement étrange de jeunes esprits. Mais ainsi le veut la passion de renouveler l’histoire à tout prix. Donc, se demandent ces jeunes gens, à la suite de bien d’autres, pourquoi deux histoires du Canada, l’une d’esprit canadien-français et l’autre d’esprit canadian ? Pourquoi point le manuel unique, rêve de tous nos assimilés et de tous nos assimilateurs ?

À mes jeunes amis, je me vois forcé de servir des répétitions : ce n’est pas l’histoire qui nous a divisés. Relisez là-dessus ma