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L’Histoire Acadienne

la première fois, entre la terre canadienne et les hommes qui étaient venus de l’autre côté, s’est nouée l’alliance de l’éternelle amitié. Bien avant nous les Acadiens ont compris que la patrie est le pays de la naissance et de la vie, la terre où dorment les ancêtres, et qu’à celle-là seule ils devaient l’amour de leur cœur, la force de leurs bras et le sang de leurs veines.


II


Donc, avec le traité d’Utrecht en 1713, qui consacre définitivement l’occupation anglaise, les Acadiens sont déjà fortement organisés pour la survivance. Aussi, quel peuple français magnifique peuplerait aujourd’hui les provinces du golfe s’il n’y avait eu le crime de 1755 ! Mesdames, Messieurs, demandons-nous, par quelle étrange fatalité, ou plutôt par quel dessein caché de la Providence, tous les groupes français au Canada, après les premières périodes d’organisation et d’espérance, se voient tout à coup mis en péril d’anéantissement. Après 1755 en Acadie, souvenez-vous de 1760 dans le Québec, de 1890 au Manitoba, de 1912 en l’Ontario. Autour de nous les groupes étrangers n’ont qu’à se laisser grandir dans la richesse et la prospérité qu’ils cueillent à portée de la main. Notre histoire à nous, coupée de catastrophes, n’est qu’un perpétuel recommencement.

En 1755, voila donc quarante ans que l’Acadie est devenue possession anglaise. Jusqu’en 1749, date de la fondation d’Halifax, les conquérants ne prennent point pied dans le pays français ; tout au plus tiennent-ils garnison à Port-Royal devenu Annapolis. Tranquilles sur leurs