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Notre Maître, Le Passé

Des mesures de ce genre seraient à coup sûr répudiées par la masse du peuple. » Faisant écho à celle des chefs, la confiance des simples députés se manifeste par des formules encore plus excessives : « J’ai foi dans la conscience du parlement fédéral, » répond M. Beaubien aux inquiétudes de M. Joly. « Nous ne devons pas supposer de mauvaises intentions aux hommes, mais plutôt supposer qu’ils nous traiteront, comme ils désirent être traités eux-mêmes, avec justice et selon leur conscience. »

À tout prendre, la nature même du pacte nouveau ne pouvait-elle justifier beaucoup d’espérances ? Des unités ethniques et politiques venaient de se grouper, en vue de leur protection plus efficace contre l’agression étrangère, et pour l’accroissement de leur vie propre par une coopération d’efforts mieux ordonnés. Cependant l’autonomie des unités faisait la base de ce pacte fédératif. On l’y avait mise comme l’un des principes essentiels de ces sortes d’alliances. Fédération ne veut pas dire fusion. Les jeunes États canadiens s’étaient fédérés, non pas pour abdiquer leur personnalité, mais pour la mieux maintenir en groupant leurs forces. À quoi bon d’ailleurs une fédération, s’il eut fallu la payer du prix de son âme et de son avenir ? Et voici, sans doute, comme l’on raisonnait, il y a cinquante ans : Si la personnalité nationale est le premier bien que chacun des États ou chacune des races fédérés entend protéger contre l’ennemi du dehors, à tout le moins faut-il s’attendre que ce patrimoine sera d’abord respecté par les co-signataires du pacte. Plus que cela, pensait-on : en retour de la contribution qu’il fournit à la défense commune, contre l’ennemi du dehors, chaque associé n’a-t-il pas un droit sacré à se voir défendu à l’intérieur par tous les