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Notre Maître, Le Passé

seil souverain, et, pour ainsi dire les seuls permanents, nos évêques ont tenu, au parlement de la Nouvelle-France, le premier rôle. C’est déjà marquer en quel sens ils vont orienter la législation de la colonie d’où nous vient une partie de notre droit actuel. L’on sait également avec quelle énergie, contre les gouverneurs et les parlementaires gallicans du conseil, ils ont défendu les prérogatives de la puissance spirituelle. Autant qu’ils l’ont pu, ils ont fait admettre et fait passer dans nos mœurs publiques, la juste subordination des pouvoirs. Et qu’est-ce à dire si ce n’est poser là le fondement de l’ordre social et politique ? Ceux qui savent le rôle de la vérité dans la vie d’un peuple, les relations étroites des droits de l’homme aux droits de Dieu, salueront dans ces hommes d’Église de vrais hommes d’État. Il n’est pas nécessaire d’avoir fouillé bien longuement l’histoire du monde, pour apercevoir dans l’État désorbité et sans frein, un fauteur de désordre, l’ennemi le plus dangereux de la liberté humaine. « Droits de l’homme, liberté de l’homme, liberté humaine, existence distincte des nations », a dit Louis Veuillot, « autant de pensées du Christ, voulues et acceptées par sa seule Église ».

De cet ordre catholique, de la prédominance de l’idée religieuse, devait naître une jeune race remarquable par sa haute moralité et le bel ensemble de son âme. Son histoire sociale sera émouvante comme une pastorale traversée de chants épiques ; son histoire militaire fera penser à un manuel d’héroïsme. Mais nous ne savons si l’Église n’a pas déposé au front du jeune peuple un laurier encore plus glorieux.

La Nouvelle-France est restée fidèle aux desseins de ses fondateurs. La pénétration française