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Notre Maître, Le Passé

aux côtés de Jeanne Mance, l’hospitalière ; elle sera la première maîtresse d’école de Ville-Marie.

Tout à l’heure, en fermant l’histoire de sa vie, j’ai cherché un mot qui qualifie justement son œuvre. Et j’écris que ce fut une entreprise de haute éducation populaire et de belle vaillance surnaturelle.

Nos fondateurs nous apparaissent grands, non seulement par le labeur qu’ils mettent dans leur œuvre, labeur effrayant, mais aussi et peut-être plus, par les lointaines visées qu’ils y enferment. Parce qu’ils travaillent pour un long avenir, tous les jours ils apprennent à se dépasser. Ces hommes et ces femmes d’autrefois savent bel et bien qu’ils fondent un pays et une race. De ce haut devoir ils acceptent pleinement les conséquences, et la race qu’ils fondent, ils la veulent noble, loyale et pure, à la mesure de ses origines.

Voulez-vous savoir pourquoi Marguerite se prodigue, avec tout son zèle, auprès des « filles du roi » que les vaisseaux nous amènent ? Ces pauvres orphelines qui tombent ici bien dépaysées, bien éplorées, ont besoin de consolation et plus encore de protection. Marguerite les héberge chez elle ; elle se constitue leur gardienne ; elle initie les pauvres petites à leur prochaine existence. À Ville-Marie, c’est à l’école de Marguerite Bourgeoys que les « filles du roi » apprennent à coudre, à filer, à faire du pain, à devenir de bonnes ménagères, les aïeules au cœur d’or et à la trempe de fer. Leur gardienne ne se sépare d’elles qu’au jour du mariage que souvent elle préside. Au bas des actes datés du « Parloir de la Congrégation », on peut lire encore la signature nette et fine de Marguerite Bourgeoys qui a suivi jusque-là ses protégées. Et pourquoi cette vigilance dévouée et