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Notre Maître, Le Passé

tableau et d’un grand artiste. De Saint-Lusson donne lecture de sa commission que traduit sur le champ Nicolas Perrot. La croix bénite solennellement s’élève dans les airs, puis, à côté d’elle, prend place un haut piquet de cèdre où sont arborées les armes de France. Pendant ce temps les Français aidés des missionnaires entonnent le « Vexilla regis » et l’« Exaudiat », à la grande admiration des sauvages. Puis, par trois fois, en élevant dans sa main une poignée de gazon et de terre, de Saint-Lusson fait crier : « Vive le roi », par toute l’assemblée, acclamations que des salves de coups de fusil viennent ponctuer. Mais alors, le silence se fait. Le Père Allouez s’avance, le Père Allouez qui, avec les Pères Dablon et Marquette, forme alors, selon Bancroft, le grand « triumvirat de la mission du Sault ». Sous peine d’omettre la partie maîtresse, l’éloquence ne peut manquer à une fête indienne, et le Père Allouez va parler. En grandes périodes chargées de métaphores pompeuses, selon le goût de l’auditoire, l’orateur entreprend de faire l’éloge du « grand Capitaine de la France » qui, à partir de ce jour, devient le protecteur et le père des nations indiennes. « Il est le Capitaine des plus grands Capitaines et n’a pas son pareil au monde », proclame le Père Allouez… « Quand il attaque, il est plus redoutable que le tonnerre, la terre tremble, l’air et la mer sont en feu par la décharge de ses canons ». De Saint-Lusson parle à son tour. Il le fait « d’une façon guerrière et éloquente ». Et les acclamations s’élèvent de l’auditoire enthousiasmé, grisé par les discours, par les chants et la splendeur de la mise en scène. Il ne reste plus qu’à dresser un procès-verbal de cette prise de possession où les Français présents viennent apposer leurs signatures et