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MARIE-DIDACE

un fameux chasseur, mais qu’on aurait de la misère à vous accoter sur les histoires de chasse.

Le curé Lebrun s’efforça de sourire. Le prêtre se sentait réjoui de remettre une si belle ouaille au bon Pasteur mais l’homme pleurait son ami. Après s’être mouché bruyamment, il se leva pour de bon. Les femmes l’aidèrent à endosser son cache-poussière, puis s’agenouillèrent pour la bénédiction. À voix basse il leur dit :

— Je reviendrai lui porter la communion.

Le malade, accablé, ne parut pas entendre. Après quelques instants de silence, les yeux égarés, il demanda, d’une voix saisie :

— J’vas recevoir le bon Dieu ?

Le prêtre fit signe que oui.

— Retardez pas, monsieur le curé. En tout cas, si je vous revois pas, vous pourrez vous servir de mon affût… à… la baie…

Cependant Didace n’acheva pas. Tout le temps que son curé s’apprêta à partir, pas une fois il ne leva la vue sur lui. D’un air bourru, il semblait examiner soigneusement l’Île du Moine, les vastes champs communaux qui rougeoyaient de salicaires jusqu’au fleuve, l’immense pâturage où les bêtes broutaient l’herbe riche. Aucune main familière, pas même celle d’un Survenant, ne les rentrerait à