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PRÉFACE

tous les mythes se métamorphoser et se mélanger. Les plus antiques doctrines sont restaurées ; la philosophie grecque les interprète et les épure, tandis que la philosophie juive affirme son dogme de l’unité divine. Mais un mouvement particulier agitait toujours les sectes et les écoles de la Judée, soumise maintenant aux Romains. L’idée messianique se réveille, plus ardente que jamais, et du fond de la Galilée une voix se fait entendre qui répèle : « Le royaume de Dieu est proche. » Jésus sème dans les cœurs déshérités sa parole inspirée : et la dernière des grandes religions sémiliques germe dans les âmes, pleines d’espérances inconnues.

La même haine que les anciens Nabis portaient à Babel et à Asiour vit toujours chez leurs descendants ; et les mêmes anathèmes sont lancés contre Rome. Le fanatisme est à son comble : Jérusalem, qui en est le foyer, périt dans des flots de sang et des tourbillons de fumée. Le Temple indestructible est détruit : mais Israël dispersé emporte sa Thora, les premiers éléments de la Mischna et du Thalmud, et élève dans son cœur ur nouveau temple à sa Loi.

À partir de la chute de Jérusalem, le monde entier est devenu Romain. Rien ne subsiste plus de l’Asie ni de la Grèce, rien, si ce n’est cependant le germe déposé par Jésus de Nazareth dans l’âme des Galiléens. Il grandit ; la légende se dessine peu à peu ; Paul la propage parmi les gentils, et l’avènement du Christianisme devient le fait historique le plus important de l’époque. Au sein d’une civilisation à outrance, les âmes sont envahies par une