Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/154

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tours de bois et neuf cents chars de fer.
Et c’était Sisera le chef de cette armée.

En rouges tourbillons la flamme et la fumée,
Sur les champs d’Israël, au travers des moissons,
Ainsi que des serpents, rampaient. Les nourrissons
Meurtrissaient vainement le sein tari des mères ;
Et le maigre bétail, loin des sources amères,
Fuyait en longs troupeaux vers les monts dévastés ;
Et sur les coteaux nus, les tentes, les cités,
Lugubrement planait l’effroi des solitudes.

Telles, depuis vingt ans, les vengeances très rudes
D’Iahvé flagellaient son peuple humilié,
Lorsque, se rappelant l’Élohim oublié,
Miçraïm et la fuite et l’alliance antique,
Debora, qu’éveillait le frisson prophétique,
Cria : — Vienne le jour où Baraq montera ! —

Baraq, de Naphthali, monta vers Debora.

Le cœur mordu d’angoisse et saignant de tristesse,
Dans les monts d’Ephraïm songeait la Prophétesse,
Silencieuse, auprès du Palmier immortel,
Sur le chemin qui va de Rama vers Beth-El.
Et l’esprit d’Iahvé l’inspirait. Son œil sombre,
Fixé sur l’avenir, en interrogeait l’ombre,
Comme un flambeau penché sur un gouffre inconnu.
Mais sachant que le jour était enfin venu,