Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/212

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Attendaient, l’œil mi-clos, l’instant des sacrifices.
Et sous les lourds battants grinçaient les gonds sacrés ;
Les prêtres soulevaient, de leurs bras lacérés,
Les voiles de l’autel et les peaux suspendues ;
Et les parfums mêlaient leurs vapeurs confondues
A l’odeur du sang frais et des chairs en lambeaux.
Et soudain, côte à côte ainsi que deux flambeaux,
Resplendissaient, dressés dans la profondeur chaude,
Le divin Pilier d’or et le Bloc d’émeraude.
Puis les Dieux satisfaits et les prêtres payés,
Les matelots ont fui vers les sentiers frayés
Où, filles d’Aschtoreth, les brunes courtisanes,
Sous le réseau flottant des robes diaphanes,
Livrent aux vils baisers leurs corps indifférents.
De l’ombre des cyprès et des pins odorants,
Du bois voluptueux que fleurit le troène,
Un souffle violent s’accroît, palpite et traîne
Jusqu’aux bosquets prochains, où, lascif et charmant,
Le pâle hiérodule attend son rude amant.
Et las, rassasiés des voluptés publiques,
Le col nu surchargé d’amulettes phalliques,
Les marins, agitant au bout des avirons
Leurs ceintures de laine avec leurs bonnets ronds.
Par bandes dévalaient ; et leur foule sauvage
Emplissait en criant les barques de passage,
Et nageaient vers la terre où, tels que des fruits mûrs,
L’ancien quartier de Zour suspendait à ses murs
Des vases de métal et des plaques de verre.
Mais le