Page:Guillaume d’Orange, le marquis au court nez (trad. Jonckbloet).djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
139

— Seigneur roi, tu en as menti. Il n’y en a pas dans toute la Chrétienté ; il n’y a que toi qui portes couronne, au-dessus de qui je ne veux pas m’estimer. Mais prends ceux dont tu parles, fais les descendre chacun à son tour dans ce pré, armés et à cheval : si je ne te les tue pas tous et d’autres encore, j’abandonne tout droit à un bénéfice. Et toi-même, viens-y, si tu en as envie.

À ces mots le roi baissa la tête sur sa poitrine, et après quelques moments de silence lui dit :

— Seigneur Guillaume, je vois bien que vous êtes plein de colère.

— C’est vrai, répondit le comte, et il en est de même de tous mes parents. C’est là le sort de tout homme qui sert un mauvais seigneur : plus il fait, moins il gagne. De jour en jour sa position empire.

— Seigneur Guillaume, dit le roi, plus qu’aucun baron de ma cour vous m’avez défendu et servi par amour ; avancez-vous vers moi, je vous ferai un beau don. Prenez la terre du preux comte Foucon ; trois mille compagnons suivront votre bannière.

— Je n’en ferai rien, Sire. Le noble comte a laissé deux enfants, qui sauront bien gouverner sa terre. Donnez-m’en une autre, je ne me soucie pas de celle-ci.

— Si vous ne voulez pas prendre ce fief aux enfants, acceptez la terre d’Auberi-le-Bourguignon, et épousez sa belle-mère, Hermensant de Thuringue, la plus noble femme qui goûta jamais du vin. Trois mille chevaliers armés seront à votre service.

— Je n’en ferai rien, Sire. Le noble comte a laissé un fils ; il s’appelle Robert, mais il est encore bien petit et n’est pas encore en état de porter les armes ; si Dieu lui fait la grâce de devenir grand et fort, il saura bien gouverner tout son héritage.

— Si vous ne voulez pas de l’héritage de cet enfant, prenez donc la terre du marquis Bérenger, qui vient de mourir,