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mes terres, et qui m’a tué, mutilé ou pris mes hommes !

— C’est, répétèrent ses gens, le neveu de Guillaume, l’enragé qui, à Roncevaux, fut emmené prisonnier, par votre neveu Marados. Vivian resta en otage pour son père. Mais aujourd’hui il s’est fièrement redressé contre nous, et si vous n’en tirez vengeance, vous êtes un homme perdu.

La rage du roi se traduisit en malédictions contre Aymeric et Guillaume.

— Misérable ! dit-il, que ta race soit maudite ! Tous, vous m’avez trop souvent molesté ! Mahomet, mon seigneur, montrez votre supériorité, et vengez-moi de ces misérables qui m’ont tant de fois attaqué ! Mais par Mahomet, qui gouverne l’univers, cette fois je rassemblerai les barons de mon empire, ceux de Luiserne et tous ceux de Biterne, de Sutre et de Salerne ; pas un Sarrasin ne restera en arrière. Je leur mènerai telle armée en l’Archant, qu’ils peuvent être sûrs d’être battus. Et je tuerai Vivian.

Il se hâta autant que possible d’envoyer des brefs par tout son royaume. Il manda en Burienne le roi Barussé, à Saragosse le roi Gasteblé, en Argastaine le roi Tempesté, ainsi que les rois Josué, Borrel et Maltribé, Margot et Aeuré de Marsane ; Maltramot et Barré du pays de Sarrasins. Puis Aaroffle le roi de Valfondée, et Haucebier du pic de Grimmolée, et son fils Malegrape de Valpenée, Synagon à la barbe grise, Bauduc et Harfu de Vauprée.

Pourquoi vous les nommerais-je tous ? Il y en eut tant, qu’aucun homme n’aurait pu les compter. Ils dirent à qui voulut l’entendre, qu’avant un mois ils auraient conquis la France, tué Guillaume et coupé la tête à Vivian.

Les navires furent équipés, les voiles dressées et les fanfares sonnèrent. Il y eut tant de voiles, tant de heaumes luisants, tant d’enseignes flottantes, que jamais on ne vit telle armée, depuis que Dieu créa le monde. Il y eut trente rois et plus de cent mille mécréants, qui tous ont juré la mort de Vivian. Quand ils l’auront tué lui et sa