Page:Guillaume d’Orange, le marquis au court nez (trad. Jonckbloet).djvu/220

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travers leurs tentes, et si Guillaume se laisse persuader, vous serez secouru à temps.

— Que Dieu vous en récompense, répondit Vivian.

Le jeune homme prit un bouclier, peint à fleurs, qu’il avait arraché du cou d’un païen, et sous ce déguisement il se mit en route un peu avant la pointe du jour. À peine s’était-il éloigné d’une portée d’arbalête que le voilà arrêté par une bande de Turcs de la suite du roi Martemas d’Almérie ; ils avaient monté la garde autour de sa tente, de crainte que Vivian ne fît une sortie. Un d’eux lui cria :

— Qui êtes-vous, cavalier, répondez sans détour. Girard, pour les tromper, dit :

— Ne craignez rien, je suis Quinart de Nubie, de la suite de Desramé et son sénéchal.

— Ouidà, répondit un païen, tu n’es qu’un espion ; car celui dont tu parles est mort, tué par le traître Vivian. Barons, dit-il aux siens, c’est un homme du château, soyez assurés qu’il va chercher secours auprès du comte Guillaume à Orange. Piquez des deux sans tarder ; car s’il nous échappe, il nous arrivera malheur.

Toute la bande se jette sur lui. Girard voyant qu’il est reconnu, et qu’il n’y a pas moyen de passer, rebrousse chemin et rentre dans la forteresse.

Vivian tout étonné de le revoir déjà, lui dit :

— Comment, beau cousin, est-il possible que vous ayez déjà été à Orange ? avez-vous trouvé Guillaume au court nez, Bertrand et Hunaut à la barbe ? Viennent-ils ? Leur avez-vous tout conté ?

— Monseigneur Vivian, lui répondit Girard, vous vous trompez. Il n’est homme au monde, quel que soit son courage, qui puisse traverser le camp des Sarrasins ; il y en a trop qui font sentinelle.

— Vous avez trop peu de courage, dit Vivian ; vous n’êtes pas de la famille des preux ; vous ressemblez mal à Guillaume au court nez, qui a tant de fois traversé les rangs