Page:Guillaume d’Orange, le marquis au court nez (trad. Jonckbloet).djvu/246

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Au devant de sa troupe il reconnut l’émir qui lui avait fait la blessure la plus dangereuse ; aussitôt il lui passa sa lance à travers le corps et le jeta mort de cheval. Un cri d’admiration s’éleva du côté des Français, pendant que les Arabes se disaient :

— Nous avons du malheur, puisque les diables ont soutenu celui-ci, qui aurait dû être mort dès avant midi. Les enfants d’Aymeric nous ont fait bien du mal. Guillaume a deshonoré le roi Thibaut en lui prenant sa femme, dame Orable, et en le chassant de son royaume ; si ces gloutons s’échappent de nos mains, c’est que Mahomet nous délaisse. Nous les avons laissés s’enorgueillir trop longtemps ; mais avant que le soleil se soit couché, il faudra bien que Guillaume s’avoue vaincu et sans valeur.

— Vous en avez menti, leur cria Bertrand ; et le combat reprit avec une fureur nouvelle.

Encore une fois les Sarrasins furent repoussés, mais Aarofle vint à leur secours avec dix mille hommes de son pays. Les fuyards retournent avec lui au combat. Aarofle, une large hache à la main, vint droit à Guichart, et lui porta un tel coup, qu’il lui coupa en deux son bouclier et son cheval. La hache descendit jusqu’à terre et y pénétra une aune. Guichart tomba à terre et sa monture à côté de lui. Aarofle, qui était grand et merveilleusement fort, saisit Guichart par un pan de son haubert, et le soulevant aussi facilement qu’une branche de sureau, il le coucha sur le cou de son cheval et lui prit son épée.

Guichart cria :

— Cousin Bertrand, où es-tu ? Oncle Guillaume, vous ne me reverrez plus.

Bertrand en éprouva une vive douleur ; lui et ses cousins vinrent en aide à leur parent. Trois d’entr’eux frappent le païen sur son écu et sur son heaume, mais son armure résiste à leurs coups. Les trois autres tuent une cinquantaine de mécréants, mais cela ne leur sert à rien, puis-