Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/375

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milieu de la paume de la main, tellement que les ongles cachés dans la chair ne lui étaient plus d’aucun usage, s’approcha du corps, invoqua le nom de Dieu et du saint martyr, revint à son ancienne santé, rendit à Dieu de grandes actions de grâces, et retourna dans sa maison.

Il ne faut pas taire le miracle qui se fit encore. L’évêque Ansoald, homme de Dieu, apprenant que le saint corps approchait, envoya sur-le-champ un serviteur pour faire distribuer, de son domaine d’Interamne, une grande quantité de vin, afin que les pauvres et tous les gens du cortège pussent avoir de quoi se réconforter. Peu après qu’on eut obéi, on vint annoncer que les vases placés dans le cellier d’où l’on avait tiré le vin, et qui étaient demeurés presque vides, étaient tellement pleins que le vin coulait par-dessus les bords et sur le pavé, sans que pourtant ils se vidassent.

Quand on fut arrivé auprès de la Vienne, au bourg de Salines, le vent était contraire et soulevait les ondes du fleuve ; les bateliers tremblants commencèrent à refuser aux passagers l’entrée des barques, de peur qu’ils ne périssent, dans les eaux. Mais l’abbé Audulf, se confiant aux mérites du saint martyr, les exhorta en disant : « Mettez-vous dans le bateau, et passez avec assurance ; car le Seigneur est en état d’apaiser les ondes par les mérites du saint. » Dès que le corps fut placé dans la barque, et que les bateliers commencèrent à naviguer, les eaux se calmèrent, et ils passèrent heureusement le fleuve. Ils se reposèrent la nuit dans l’église. Une femme étrangère y arriva avec son enfant aveugle, veilla toute la