Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/377

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été abbé, vinrent au devant de lui pour recevoir leur pasteur, et ils passèrent la nuit, avec une grande dévotion, à psalmodier dans l’église. Le matin, arriva une certaine femme portant dans ses bras son enfant âgé d’à peu prés trois ans, et à moitié mort. On dit qu’il avait rendu l’âme avant d’approcher du corps du saint. Elle le posa sur le cercueil, et invoqua le saint homme en disant : « Mon bon seigneur, rends-moi mon fils. » Quand elle eut crié et prié pendant près de trois heures, l’enfant se réveilla comme d’un profond sommeil et appela sa mère aussi haut qu’il put, disant : « Mère, où es-tu ? » Transportée de joie, elle reprit vivant son fils qu’elle avait apporté mort. Ce fut un grand et admirable miracle qui inspira au peuple une vive foi en ce saint homme dont la gloire est immense dans le ciel.

Le bienheureux corps fut ensuite enlevé et transporté, comme il convenait. On se rendit au monastère de Saint-Maixent, dans lequel il avait été autrefois père des moines. Et comme c’était dans ce lieu qu’il avait commencé à tourner vers le culte de Dieu les esprits des hommes égarés, la providence divine voulut, par un juste jugement, qu’il y brillât par ses miracles, et qu’il attirât par de grands exemples beaucoup de gens aux bonnes œuvres. Pendant la translation, deux pauvres, savoir un homme et sa femme, se présentèrent au devant du corps : l’homme avait perdu un œil, et la femme deux. Ils s’approchèrent : la femme recouvra par sa foi la lumière des yeux ; l’homme, qui était plein de doute, s’en alla ayant perdu celui qu’il possédait. À leur venue, c’était le mari qui conduisait avec une corde sa