Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/246

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ensemble dans l’église ; Rauchingue, l’ayant appris, alla trouver le prêtre du lieu, le priant de lui rendre sur-le-champ ses domestiques, moyennant promesse de ne les pas châtier. Alors le prêtre lui dit : « Tu sais quel respect on doit rendre à l’église de Dieu ; tu ne peux reprendre ceux-ci sans leur avoir juré ta foi que tu les uniras pour toujours, et sans avoir promis en même temps de les exempter de toute punition corporelle. » Il demeura quelque temps en suspens sans rien dire, puis se tournant vers le prêtre, il mit les mains sur l’autel, et prêta serment en disant : « Je ne les séparerai jamais, mais plutôt aurai soin qu’ils demeurent unis. Ce qui s’est passé m’a été désagréable, parce que cela s’est fait sans mon consentement ; cependant je m’en accommode volontiers, puisque lui n’a pas pris pour femme la servante d’un autre, et qu’elle n’a pas choisi un serviteur étranger. » Le prêtre crut de bonne foi la promesse de cet homme rusé, et lui rendit ses serviteurs, après qu’il eut donné la garantie exigée ; il les reçut de lui, et l’ayant remercié, s’en retourna à sa maison. Aussitôt il fit couper un arbre, en fit abattre la tête, et ayant fait fendre le tronc avec un coin, ordonna de le creuser, ensuite fit ouvrir en terre une fosse de la profondeur de trois ou quatre pieds, et donna ordre d’y déposer ce tronc creusé ; puis y arrangeant la jeune fille en manière de morte, fit jeter dessus le serviteur, les fit couvrir d’une planche, remplit la fosse de terre, et les ensevelit ainsi vivants, disant : Comme je ne veux pas manquer à mon serment, ils ne seront jamais séparés. Le prêtre, averti de la chose, accourut en toute hâte, et