Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/314

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contenait ces choses, il l’eût déchiré en morceaux ; en sorte que le roi abandonna son projet. Le roi écrivit aussi des livres de vers à la façon de Sédule c ; mais ils n’étaient pas du tout composés selon les règles métriques ci. Il ajouta aussi plusieurs lettres à notre alphabet, savoir, le ω, des Grecs, le æ, the, uui qu’il figura de la manière que voici : ω, ψ, Ζ, Δ[1] cii ; il envoya des ordres dans toutes les cités de son royaume pour qu’on enseignât les enfants de cette manière, et pour que les livres anciennement écrits fussent effacés à la pierre ponce, et réécrits de nouveau.

En ce temps, mourut Agricola, évêque de Châlons, homme sage et d’un esprit poli, de race sénatoriale. Il éleva dans sa cité beaucoup d’édifices, arrangea des maisons, érigea une église qu’il soutint de colonnes, et orna de marbres variés et de peintures en mosaïque. Ce fut un homme d’une grande abstinence, ne faisant jamais d’autre repas que le souper, et il y demeurait si peu de temps qu’il se levait de table avant le coucher du soleil. Il était petit de stature, mais d’une très grande éloquence. Il mourut la quarante-huitième année de son épiscopat, la quatre-vingt-troisième de

  1. Les manuscrits varient sur la forme et le son de ces caractères, et Aimoin les donne autrement que Grégoire de Tours. « Le roi Chilpéric, dit-il, ajouta à nos lettres l’ω grec, et trois autres inventées par lui, dont nous insérons ici la forme et le son : χ ch, θ th, φ ph. (Aimoin, de gestis Francor., l. 3, c. 40) Le dire d’Aimoin me parait plus probable que celui de Grégoire de Tours ; les trois sons que, selon lui, Chilpéric essaya de représenter par des lettres ch, th, ph, se trouvent en effet dans les langues germaniques, et les trois formes qu’il y voulut appliquer, χ, θ, φ sont empruntées à l’alphabet grec ; tandis qu’il n’y a aucun rapport, dans aucune de ces langues, entre les sons et les caractères dont Grégoire de Tours fait mention.