Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/318

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à celui qui les avait possédées autrefois. Il se montrait envers moi humble et soumis, jurant souvent sur le tombeau du saint évêque qu’il ne ferait jamais rien contre les lois de la raison et qu’il me serait fidèle en toutes choses, tant sur ce qui regarderait mes propres affaires que sur les besoins de l’Église, car il craignait, ce qui arriva ensuite, que la ville ne retournât sous la domination du roi Sigebert. Celui-ci étant mort et Chilpéric lui ayant succédé, Leudaste rentra dans les fonctions de comte. Mérovée étant venu à Tours, lui enleva tout ce qu’il possédait. Pendant les deux années où Sigebert avait tenu la ville de Tours, il s’était tenu caché en Bretagne ; mais mis en possession, comme nous l’avons dit, de la place de comte, la tête lui tourna tellement d’insolence qu’il entrait dans la maison épiscopale couvert de sa cuirasse et de son corselet, ceint d’un carquois, la lance à la main et le casque sur la tête, ne se fiant à personne, parce qu’il était ennemi de tous. S’il siégeait comme juge avec les principaux du pays, soit laïques, soit clercs, et qu’il vît un homme soutenir son droit, aussitôt il entrait en furie, et vomissait des injures contre les citoyens ; il faisait entraîner les prêtres les mains liées, frappait les soldats de verges et commettait tant de cruautés qu’à peine pourrait-on les raconter. Après le départ de Mérovée qui lui avait enlevé son bien, il se porta calomniateur contre nous, soutenant faussement que c’était par notre conseil que Mérovée s’était emparé de ce qu’il possédait. Mais, après nous avoir causé plusieurs dommages, il nous renouvela ses serments et jura par la couverture du sépulcre de saint Martin cv qu’il ne s’élèverait plus contre nous.