Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/322

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dit : « Malheureux qui complotes avec tant d’obstination contre ton évêque, il valait bien mieux pour toi te taire, lui demander pardon et obtenir de lui ta grâce. » Alors il commença à s’écrier à haute voix et à dire : « En voilà un qui me conseille le silence, afin que je ne poursuive pas la découverte de la vérité : voilà un ennemi de la reine, qui ne veut pas qu’on informe contre ceux qui l’ont accusée. » On alla sur-le-champ rapporter cela à la reine. Modeste fut saisi, appliqué à la torture, flagellé et remis garrotté dans les mains des gardes. Tandis qu’au milieu de la nuit, il était entre deux gardes, enchaîné et retenu dans les ceps, ses gardiens s’étant endormis, il adressa à Dieu une oraison, le priant qu’il daignât, dans sa puissance, visiter un malheureux ; et saint Martin, évêque, vint avec saint Médard délier celui qu’on avait enchaîné sans qu’il l’eût mérité. Aussitôt il brisa ses liens, rompit les ceps, et, ayant ouvert la porte, entra dans la basilique de Saint-Médard où nous étions à veiller pendant la nuit.

Les évêques, assemblés à Braine[1] cviii, y furent réunis dans une même maison. Le roi étant venu leur donna à tous le salut, et ayant reçu la bénédiction s’assit avec eux ; alors l’évêque Bertrand, évêque de la ville de Bordeaux, impliqué dans l’accusation portée contre la reine, exposa l’affaire et m’interpella, disant que j’avais porté une accusation contre lui et la reine. Je niai en toute vérité avoir dit ces choses, ajoutant que je ne savais point que d’autres les eussent entendues. Le peuple était autour de la maison, faisant un grand bruit et disant : « Pourquoi impute-t-on de telles choses à

  1. Berni, selon l’abbé Lebeuf.