Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/376

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roi, mon seigneur, que je ne sens aucun mal des tourments qu’on m’a infligés. » Le roi ayant entendu ces paroles, dit : « Ne faut-il pas, en effet, qu’il soit sorcier pour n’avoir reçu aucun mal de ce qu’on lui a fait souffrir ? » Alors on l’étendit sur des roues, et on le frappa de tant de coups de courroies triplées, que les exécuteurs en étaient fatigués ; ensuite on lui entra des bâtons pointus dans les ongles des pieds et des mains, et, comme il était à ce point que l’épée était déjà levée pour lui couper la tête, il obtint de la reine qu’elle lui laissât la vie ; mais on lui fit subir une dégradation non moins cruelle que la mort ; car l’ayant mis dans un chariot, on le renvoya dépouillé de tout ce qu’il possédait à la ville de Bordeaux où il était né. Mais frappé en route d’une attaque d’apoplexie, il put à peine arriver où il lui était ordonné d’aller, et peu de temps après rendit l’esprit. Après quoi, la reine ayant pris le trésor de son enfant, tant les vêtements que les autres effets, les étoffes de soie et tout ce qu’elle put trouver, les fit consumer par le feu. On dit qu’il y en avait quatre chariots. Elle fit jeter l’or et l’argent dans une fournaise embrasée, afin qu’il ne restât rien d’entier qui pût lui rappeler la douleur de la mort de son fils.

Æthérius, évêque de Lisieux, dont nous avons parlé lxxv, fut expulsé de sa ville, et y rentra de la manière suivante : il y avait un clerc de la ville du Mans abandonné à la luxure, aimant les femmes, et livré à la gourmandise, à la fornication, et à toute espace de vices immondes. Il voyait souvent une certaine prostituée à qui il fit couper les cheveux, lui fit