Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/104

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Ainsi pénètre dans le monde et du monde dans les esprits, l’idée de la légitimité politique. Elle a pour fondement, pour première origine, en une certaine mesure du moins, la légitimité morale, la justice, la raison, la vérité ; et puis la sanction du temps, qui donne lieu de croire que la raison est entrée dans les faits, que la légitimité véritable s’est introduite dans le monde extérieur. À l’époque que nous allons étudier, vous trouverez la force et le mensonge planant sur le berceau de la royauté, de l’aristocratie, de la démocratie, de l’Église même ; partout vous verrez la force et le mensonge se réformant peu à peu sous la main du temps ; le droit et la vérité prenant place dans la civilisation. C’est cette introduction du droit et de la vérité, dans l’état social qui a développé peu à peu l’idée de la légitimité politique ; c’est ainsi qu’elle s’est établie dans la civilisation moderne.

Quand donc on a essayé, à diverses époques, de faire de cette idée la bannière du pouvoir absolu, on l’a détournée de son origine véritable. Elle est si peu la bannière du pouvoir absolu, que c’est au nom du droit et de la justice qu’elle a pénétré et pris pied dans le monde. Elle n’est pas non plus exclusive ; elle n’appartient à personne en particulier, elle naît partout où se développe le droit. La légitimité politique s’attache à la liberté comme au pouvoir, aux droits individuels comme aux formes suivant lesquelles s’exercent les fonctions publiques. Nous la rencontrerons en avançant, je le répète, dans les systèmes les plus contraires, dans le système féodal, dans les communes de Flandre et d’Allemagne, dans les républiques