Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/239

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et de durée. La plus grande partie de la population des communes était à un degré d’ignorance, de brutalité, de férocité, tel qu’elle était très difficile à gouverner. Au bout de très peu de temps, il y eut, dans l’intérieur de la commune, presque aussi peu de sécurité qu’il y en avait auparavant dans les relations des bourgeois avec le seigneur. Il s’y forma cependant assez vite une bourgeoisie supérieure. Vous en comprenez sans peine les causes. L’état des idées et des relations sociales amena l’établissement des professions industrielles légalement constituées, des corporations. Le régime du privilège s’introduisit dans l’intérieur des communes, et à sa suite une grande inégalité. Il y eut bientôt partout un certain nombre de bourgeois considérables, riches, et une population ouvrière plus ou moins nombreuse, qui, malgré son infériorité, avait une grande part d’influence dans les affaires de la commune. Les communes se trouvèrent donc divisées en une haute bourgeoisie, et une population sujette à toutes les erreurs, tous les vices d’une populace. La bourgeoisie supérieure se vit pressée entre la prodigieuse difficulté de gouverner cette population inférieure, et les tentatives continuelles de l’ancien maître de la commune qui cherchait à ressaisir son pouvoir. Telle a été cette situation, non-seulement en France, mais en Europe, jusqu’au seizième siècle. C’est là peut-être la principale cause qui a empêché les communes de prendre, dans plusieurs des pays de l’Europe, et spécialement en France, toute l’importance politique qu’elles auraient pu avoir. Deux esprits s’y combattaient sans cesse : dans la population inférieure, un esprit démocratique aveugle, effréné,