Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/368

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toire dans l’ordre temporel ; l’un préparait la décadence de l’ancienne monarchie ecclésiastique, l’autre consommait la ruine des anciennes libertés féodales et communales. Leur simultanéité tenait, vous l’avez vu, à ce que les révolutions de la société religieuse avaient marché plus vite que celles de la société civile ; l’une était arrivée au moment de l’affranchissement de la pensée individuelle, tandis que l’autre n’en était encore qu’au moment de la concentration de tous les pouvoirs en un pouvoir général. La coïncidence des deux faits, loin de provenir de leur similitude, n’empêchait donc point leur contradiction. Ils étaient l’un et l’autre un progrès dans le cours de la civilisation, mais des progrès liés à des situations différentes, des progrès de date morale diverse, pour ainsi dire, quoiqu’ils coïncidassent dans le temps. Il était inévitable qu’ils en vinssent à se heurter et à se combattre avant de réussir à se concilier.

Leur premier choc eut lieu en Angleterre. La lutte du libre examen, fruit de la réforme, contre la ruine de toute liberté politique, fruit des succès de la monarchie pure, la tentative d’abolir le pouvoir absolu dans l’ordre temporel comme dans l’ordre intellectuel, c’est là le sens de la révolution d’Angleterre ; c’est là son rôle dans le cours de notre civilisation.

Pourquoi cette lutte s’est-elle engagée en Angleterre plutôt qu’ailleurs ? pourquoi les révolutions de l’ordre politique ont-elles coïncidé de plus près dans ce pays que sur le continent, avec les révolutions de l’ordre moral ?

La royauté anglaise a subi les mêmes vicissitudes que la royauté continentale ; elle arriva, sous le