Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/370

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Il en résulta qu’au moins dans son origine, comme redressement des abus et de la tyrannie ecclésiastique, comme émancipation de l’esprit humain, la réforme anglaise fut beaucoup moins complète que sur le continent. Elle se fit, comme de raison, dans l’intérêt de ses auteurs. Le roi et l’épiscopat maintenu se partagèrent, soit comme richesse, soit comme pouvoir, les dépouilles du gouvernement prédécesseur, de la papauté. L’effet ne tarda pas à s’en faire sentir. On disait que la réforme était faite ; et la plupart des motifs qui l’avaient fait souhaiter subsistaient toujours. Elle repartit sous la forme populaire ; elle réclama, contre les évêques, ce qu’elle avait demandé contre la cour de Rome ; elle les accusa d’être autant de papes. Toutes les fois que le sort général de la révolution religieuse était compromis, toutes les fois qu’il s’agissait de lutter contre l’ancienne église, toutes les portions du parti réformé se ralliaient et faisaient face à l’ennemi commun ; mais le danger passé, la lutte intérieure recommençait ; la réforme populaire attaquait de nouveau la réforme royale et aristocratique, dénonçait ses abus, se plaignait de sa tyrannie, la sommait de tenir ses promesses, de ne pas reproduire le pouvoir qu’elle avait détrôné. Vers la même époque se déclarait dans la société civile un mouvement d’affranchissement, un besoin de liberté politique naguère inconnu ou du moins impuissant. Dans le cours du seizième siècle la prospérité commerciale de l’Angleterre s’accrut avec une extrême rapidité ; en même temps la richesse territoriale, la propriété foncière changea en grande partie de mains. C’est un fait auquel on n’a pas fait