Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/76

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moins concentrée dans les villes. Mais comme il ne s’agit ici que de la population européenne, ce qui se passait en Orient nous intéresse peu.

En nous renfermant dans l’Occident, nous retrouvons partout le fait que j’ai indiqué. Dans les Gaules, en Espagne, ce sont toujours des villes que vous rencontrez ; loin des villes, le territoire est couvert de marais, de forêts. Examinez le caractère des monuments romains, des routes romaines. Vous avez de grandes routes qui aboutissent d’une ville à une autre ; cette multitude de petites routes qui aujourd’hui se croisent en tous sens sur le territoire, était alors inconnue. Rien ne ressemble à cette innombrable quantité de petits monuments, de villages, de châteaux, d’églises, dispersés dans le pays depuis le moyen-âge. Rome ne nous a légué que des monuments immenses, empreints du caractère municipal, destinés à une population nombreuse, agglomérée sur un même point. Sous quelque point de vue que vous considériez le monde romain, vous y trouverez cette prépondérance presque exclusive des villes, et la non-existence sociale des campagnes. Ce caractère municipal du monde romain rendait évidemment l’unité, le lien social d’un grand État, extrêmement difficile à établir et à maintenir. Une municipalité comme Rome avait pu conquérir le monde ; il lui était beaucoup plus mal aisé de le gouverner, de le constituer. Aussi, quand l’œuvre paraît consommée, quand tout l’Occident et une grande partie de l’Orient sont tombés sous la domination romaine, vous voyez cette prodigieuse quantité de cités, de petits États faits pour l’isolement et l’indépendance, se