Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/77

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désunir, se détacher, s’échapper pour ainsi dire en tous sens. Ce fut là une des causes qui amenèrent la nécessité de l’Empire, d’une forme de gouvernement plus concentrée, plus capable de tenir unis des éléments si peu cohérents. L’Empire essaya de porter de l’unité et du lien dans cette société éparse. Il y réussit jusqu’à un certain point. Ce fut entre Auguste et Dioclétien qu’en même temps que se développait la législation civile, s’établit ce vaste système de despotisme administratif qui étendit sur le monde romain un réseau de fonctionnaires hiérarchiquement distribués, bien liés, soit entre eux, soit à la cour impériale, et uniquement appliqués à faire passer dans la société la volonté du pouvoir, dans le pouvoir les tributs et les forces de la société.

Et non-seulement ce système réussit à rallier, à contenir ensemble les éléments du monde romain : mais l’idée du despotisme, du pouvoir central, pénétra dans les esprits avec une facilité singulière. On est étonné de voir, dans cette collection mal unie de petites républiques, dans cette association de municipalités, prévaloir rapidement le respect de la Majesté impériale unique, auguste, sacrée. Il fallait que la nécessité d’établir quelque lien entre toutes ces parties du monde romain fût bien puissante, pour que les croyances, et presque les sentiments du despotisme, trouvassent dans les esprits un si facile accès.

C’est avec ces croyances, avec son organisation administrative, et le système d’organisation militaire qui y était joint, que l’Empire romain a lutté contre la dissolution qui le travaillait intérieurement, et contre l’invasion des Barbares. Il a lutté longtemps,