Page:Gustave Flaubert - Trois contes.djvu/140

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Tout à coup, une voix lointaine, comme échappée des profondeurs de la terre, fit pâlir le Tétrarque. Il se pencha pour écouter ; elle avait disparu. Elle reprit ; et en claquant dans ses mains, il cria :

— Mannaëi ! Mannaëi !

Un homme se présenta, nu jusqu’à la ceinture, comme les masseurs des bains. Il était très grand, vieux, décharné, et portait sur la cuisse un coutelas dans une gaine de bronze. Sa chevelure, relevée par un peigne, exagérait la longueur de son front. Une somnolence décolorait ses yeux, mais ses dents brillaient, et ses orteils posaient légèrement sur les dalles, tout son corps ayant la souplesse d’un singe, et sa figure l’impassibilité d’une momie.

— Où est-il ? demanda le Tétrarque.

Mannaëi répondit, en indiquant avec son pouce un objet derrière eux :

— Là ! toujours !

— J’avais cru l’entendre !

Et Antipas, quand il eut respiré largement, s’informa de Iaokanann, le même que les Latins appellent saint Jean-Baptiste. Avait-on revu ces deux hommes, admis par indulgence, l’autre mois, dans son cachot, et savait-on, depuis lors, ce qu’ils étaient venus faire ?

Mannaëi répliqua :