Page:Gustave Flaubert - Trois contes.djvu/89

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mère l’embrassait, il acceptait froidement son étreinte, paraissant rêver à des choses profondes.

Il tua des ours à coups de couteau, des taureaux avec la hache ; des sangliers avec l’épieu ; et même une fois, n’ayant plus qu’un bâton, se défendit contre des loups qui rongeaient des cadavres au pied d’un gibet.


Un matin d’hiver, il partit avant le jour, bien équipé, une arbalète sur l’épaule et un trousseau de flèches à l’arçon de la selle.

Son genet danois, suivi de deux bassets, en marchant d’un pas égal faisait résonner la terre. Des gouttes de verglas se collaient à son manteau, une brise violente soufflait. Un côté de l’horizon s’éclaircit ; et, dans la blancheur du crépuscule, il aperçut des lapins sautillant au bord de leurs terriers. Les deux bassets, tout de suite, se précipitèrent sur eux ; et, çà et là, vivement, leur brisaient l’échine.

Bientôt, il entra dans un bois. Au bout d’une branche, un coq de bruyère engourdi par le froid dormait la tête sous l’aile. Julien, d’un revers d’épée, lui faucha les deux pattes, et sans le ramasser continua sa route.

Trois heures après, il se trouva sur la pointe d’une montagne tellement haute que le ciel sem-