Page:Guyot - Les principes de 89 et le socialisme.djvu/196

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M. Henry Maret disait dans le Radical du 14 octobre 1893 :

Il n’y a pas de droit contre le droit, et le droit à l’existence prime le droit de propriété. La société a parfaitement le droit de déposséder ceux qui ont, pour donner à ceux qui n’ont pas.

« Le droit à l’existence » ? mais pour l’enfant, ce sont les soins et les sacrifices des parents, et s’il est orphelin, son héritage.

Comment ce droit à l’existence prime-t-il le droit à la propriété, alors qu’ils sont identiques ? L’individu ne peut vivre qu’à la condition de posséder des aliments : et cette possession de capitaux circulants est un acte de propriété.

Dans la dernière des conceptions juridiques contenues dans ces cinq lignes, M. Henry Maret, qui a la coquetterie injustifiée de se prétendre libéral, déclare que « la société », être abstrait qui ne peut agir que par des hommes en chair et en os, a le droit de prendre aux uns pour donner aux autres, le droit de dépouiller ceux-ci et d’enrichir ceux-là. Il ne supprime pas la propriété, il la déplace. Seulement, au lieu de la laisser à ceux qui l’ont acquise par le libre jeu des lois économiques, leur travail, leur habileté, leurs héritages, il l’enlève de force aux uns pour l’offrir à d’autres ; il expulse les propriétaires actuels, mais il en fait d’autres : et quelles sont les règles qui présideraient à la répartition des propriétés ainsi confisquées, et à leur conservation, leur transmission, leur démembrement ? M. Henry Maret y a-t-il pensé ?