Page:Héricourt - La Femme affranchie.djvu/195

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d’apprendre, comme on dit, à l’exercer en s’en servant, on l’emploiera tout simplement à se mutiler les doigts.

La jeune femme. Ne pourrait-on vous objecter que, d’après votre théorie du Droit, tous étant égaux, personne ne peut s’arroger la fonction de distribuer les droits ?

L’auteur. La théorie, c’est l’idéal vers lequel doit tendre la pratique ; si l’on n’avait pas cet idéal, on ne saurait en vertu de quels principes se diriger ; mais dans la réalité sociale, il y a des majeurs, et des mineurs destinés à devenir majeurs.

Si je disais que les majeurs ont le droit d’accorder ou de refuser le droit aux mineurs, je manquerais essentiellement à mes principes : c’est la loi, expression des consciences les plus avancées, en attendant qu’elle le soit de la conscience de tous, qui prononce sur la majorité politique et en fixe les conditions. Le droit est virtuel en chacun de nous : donc nul n’a le droit de le donner, de l’ôter, de le contester : il se reconnaît quand on est en état de l’exercer et qu’on le revendique ; et l’on prouve que Ton est en état de l’exercer, quand on satisfait aux conditions fixées par la loi.

La jeune femme. Quelles seraient, d’après vous, ces conditions pour la jouissance du Droit politique ?

L’auteur. Vingt-cinq ans d’âge et un certificat qui atteste qu’on sait lire, écrire, calculer ; qu’on possède élémentairement l’histoire et la géographie de son pays ; de plus, une bonne théorie du Droit et du Devoir et de la destinée de l’humanité sur cette terre. L’assimilation d’un petit volume suffirait, comme vous le voyez, pour que tout homme et toute femme de vingt-cinq ans et sains d’esprit, pussent jouir de leurs droits politiques, après