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que les lois qui régissent ta pensée sont identiques à celles de l’univers : tu ne peux donc accepter ou créer une hypothèse fondée sur le simple, l’inétendu, l’indivisible, l’absolu, l’infini. Ces mots n’ont aucun sens pour la pensée, et sont contradictoires à la Raison et à la Science. Il serait absurde, tu dois le comprendre, de prétendre les justifier, en alléguant l’existence d’un ordre de choses régi par des lois opposées à celles de la Raison et de l’univers. Qui a vu cet ordre de choses ? Qui oserait prétendre, sans preuves possibles, que cet univers, que nous croyons un, est contradictoire à lui-même ?

C’est en dirigeant ainsi vos élèves, Madame, en les préservant avec soin de la maladie métaphysique, que vous les préserverez en même temps des vices intellectuels en si grande vogue aujourd’hui. Ce ne seront pas elles qui prendront des lois pour des êtres en soi ; discuteront gravement sur les causes premières et les essences, comme si elles avaient reçu leurs confidences intimes ; généraliseront des faits exceptionnels ; rangeront sous une loi des phénomènes qui n’y sont pas soumis ; nieront des faits bien observés, sous prétexte qu’ils ne rentrent pas dans le cadre des lois connues ; tireront d’un fait des conséquences qu’il ne contient pas ; introduiront la classification dans ce qui ne saurait la comporter ; établiront de fausses séries ; bâtiront des hypothèses sur des pointes d’aiguille. Non, elles considéreront toute théorie scientifique comme une solution provisoire, un point d’interrogation, et toute hypothèse ou théorie contradictoire à la Raison et aux faits prouvés, n’attirera que leur dédain.

Vos élèves observent bien, raisonnent bien, ont une idée générale et précise des sciences naturelles, de la Physique, de la