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Cette situation faite à la femme exige donc de profondes réformes légales et sociales : elle le sait ou le sent : il faut encore en prendre son parti, et travailler à ces réformes, sous peine de voir la civilisation moderne périr par la minorité de la femme, comme la civilisation ancienne a péri par l’esclavage.

L’homme n’aime plus la femme : il cherche en elle un complément obligé de dot, un associé commode, un moyen de se procurer quelques sensations ou distractions, une servante, une garde malade non rétribuée ; la femme ne l’ignore pas ; et, à son tour, elle n’aime plus l’homme ; cette désolante situation des sexes en face l’un de l’autre, exige que la femme soit délivrée de la tutelle de l’homme qui la heurte, l’irrite, la ruine trop souvent ; qui se sert durement de droits sans fondement dans la nature des choses : droits qu’elle ne veut plus subir parce qu’elle est trop intelligente aujourd’hui ; et parce qu’elle aime beaucoup moins son conjoint dont elle se sait n’être plus suffisamment aimée.

L’on n’ignore pas ce qu’est devenu le mariage, et quel usage une infinité d’hommes font des privilèges qu’ils ont comme chefs de la communauté. Par leurs passions, leurs vices, leur incurie, ils désolent souvent leur femme et compromettent leur avenir et celui de leurs enfants. La femme commence à ne plus vouloir de cette situation humiliante et dangereuse : elle murmure, elle s’insurge dans son cœur, et beaucoup de jeunes femmes déjà préfèrent renoncer à l’union légale que de subir, les conséquences du mariage actuel : que peut faire la société pour parer à ce danger, sinon réformer le mariage ?