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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

C’est donc Mélampus qui a institué la procession du phalle que l’on porte en l’honneur de Bacchus, et c’est lui qui a instruit les Grecs des cérémonies qu’ils pratiquent encore aujourd’hui.

Mélampus est, à mon avis, un sage qui s’est rendu habile dans l’art de la divination. Instruit par les Égyptiens d’un grand nombre de cérémonies, et, entre autres, de ce qui concerne le culte de Bacchus, ce fut lui qui les introduisit dans la Grèce, avec quelques légers changements. Je n’attribuerai point en effet au hasard la ressemblance qu’on voit entre les cérémonies religieuses des Égyptiens et celles que les Grecs ont adoptées. Si cette ressemblance n’avait pas d’autres causes, ces cérémonies ne se trouveraient pas si éloignées des mœurs et des usages des Grecs, et d’ailleurs elles n’auraient pas été nouvellement introduites. Je ne dirai pas non plus que les Égyptiens aient emprunté des Grecs ces cérémonies, ou quelque autre rite : il me semble bien plutôt que Mélampus apprit ce qui concerne le culte de Bacchus par le commerce qu’il eut avec les descendants de Cadmus de Tyr, et avec ceux des Tyriens de sa suite, qui vinrent de Phénicie dans cette partie de la Grèce qu’on appelle aujourd’hui Béotie.

L. Presque tous les noms des dieux sont venus d’Égypte en Grèce. Il est très-certain qu’ils nous viennent des Barbares : je m’en suis convaincu par mes recherches. Je crois donc que nous les tenons principalement des Égyptiens. En effet, si vous exceptez Neptune, les Dioscures, comme je l’ai dit ci-dessus, Junon[1], Vesta, Thémis, les Grâces et les Néréides, les noms de tous les autres dieux, ont toujours été connus en Égypte. Je ne fais, à cet égard, que répéter ce que les Égyptiens disent eux-mêmes. Quant aux dieux qu’ils assurent ne pas connaître, je pense que leurs noms viennent des Pélasges ; j’en excepte Neptune, dont ils ont appris le nom des Libyens ; car, dans les premiers temps, le nom de Neptune n’était connu que des Libyens, qui ont

  1. Manéthon parle de la Junon des Égyptiens, et assure qu’on lui sacrifiait trois hommes par jour, qu’on examinait comme les veaux mondes. Amasis abolit ces sacrifices barbares. Diodore de Sicile, Horapollon et d’autres auteurs font aussi mention de cette Junon. (L.)