Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 1, 1850.djvu/165

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
HISTOIRE D’HÉRODOTE.

LVIII. L’oracle de Thèbes en Égypte, et celui de Dodone, ont entre eux beaucoup de ressemblance. L’art de prédire l’avenir, tel qu’il se pratique dans les temples, nous vient aussi d’Égypte ; du moins est-il certain que les Égyptiens sont les premiers de tous les hommes qui aient établi des fêtes ou assemblées publiques, des processions, et la manière d’approcher de la Divinité et de s’entretenir avec elle : aussi les Grecs ont-ils emprunté ces coutumes des Égyptiens. Une preuve de ce que j’avance, c’est qu’elles sont en usage depuis longtemps en Égypte, et qu’elles n’ont été établies que depuis peu chez les Grecs.

LIX. Les Égyptiens célèbrent tous les ans un grand nombre de fêtes, et ne se contentent pas d’une seule. La principale, et celle qu’ils observent avec le plus de zèle, se fait dans la ville de Bubastis, en l’honneur de Diane ; la seconde, dans la ville de Busiris, en l’honneur d’Isis. Il y a dans cette ville, qui est située au milieu du Delta, un très-grand temple consacré à cette déesse. On la nomme en grec Déméter (Terre-Mère, Cérès). La fête de Minerve est la troisième ; elle se fait à Saïs. On célèbre la quatrième à Héliopolis, en l’honneur du Soleil ; la cinquième, à Buto, en celui de Latone ; la sixième enfin à Paprémis, en celui de Mars.

LX. Voici ce qui s’observe en allant à Bubastis[1] : on s’y rend par eau, hommes et femmes pêle-mêle et confondus les uns avec les autres ; dans chaque bateau il y a un grand nombre de personnes de l’un et de l’autre sexe. Tant que dure la navigation, quelques femmes jouent des castagnettes, et quelques hommes de la flûte ; le reste, tant hommes que femmes, chante et bat des mains. Lorsqu’on passe près d’une ville, on fait approcher le bateau du rivage. Parmi les femmes, les unes continuent à chanter et à jouer des castagnettes, d’autres crient de toutes leurs

  1. Ce grand nombre de fêtes, et surtout la gaîté répandue sur ceux qui se rendaient par eau à Bubastis pour y célébrer celle de Diane, prouvent que les Égyptiens étaient un peuple gai, qui se livrait à la joie et aux plaisirs. Il a plu cependant à l’abbé Winckelmann de nous le représenter (Hist de l’art, liv. ii, chap. 1) comme étant d’un caractère sombre. Les relations modernes justifient le portrait qu’en fait Hérodote. (L.)