Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 1, 1850.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
218
HISTOIRE D’HÉRODOTE.

avaient coutume de se servir en cette occasion ; mais il se trompa pour le nombre, et, au lieu de douze coupes, il n’en apporta que onze pour les douze rois. Alors Psammitichus, qui se trouvait au dernier rang, voyant qu’il n’avait point de coupe comme les autres, prit son casque, qui était d’airain, et s’en servit pour les libations. Tous les autres rois étaient aussi dans l’usage de porter un casque, et ils l’avaient alors en tête. Ce fut donc sans aucun mauvais dessein que Psammitichus se servit du sien. Mais les autres rois, ayant réfléchi sur son action, et sur l’oracle qui leur avait prédit que celui d’entre eux qui ferait des libations avec un vase d’airain deviendrait un jour seul roi de toute l’Égypte, examinèrent ce prince ; et, ayant reconnu par ses réponses qu’il n’avait point agi de dessein prémédité, ils crurent qu’il serait injuste de le faire mourir ; mais ils le dépouillèrent de la plus grande partie de sa puissance et le reléguèrent dans les marais, avec défense d’en sortir et d’entretenir aucune correspondance avec le reste de l’Égypte.

CLII. Ce prince s’était auparavant sauvé en Syrie pour fuir la persécution de Sabacos, roi d’Éthiopie, qui avait fait mourir son père Nécos. Les habitants du nome Saïte le rappelèrent lorsque Sabacos abandonna l’Égypte, à l’occasion d’une vision qu’il avait eue. Depuis il fut élevé sur le trône ; mais il lui arriva d’être exilé dans les marais, pour avoir fait des libations avec son casque. Ce fut son second exil. Sensible à cet outrage, et résolu de se venger des auteurs de son exil, il envoya à Buto consulter l’oracle de Latone, le plus véridique des oracles d’Égypte. Il lui fut répondu qu’il serait vengé par des hommes d’airain sortis de la mer. D’abord il ne put se persuader que des hommes d’airain vinssent à son secours ; mais, peu de temps après, des Ioniens et des Cariens qui s’étaient mis en mer pour pirater, s’étant vus obligés de relâcher en Égypte, descendirent à terre revêtus d’armes d’airain. Un Égyptien courut en porter la nouvelle à Psammitichus dans les marais ; et comme jusqu’alors cet Égyptien n’avait jamais vu d’hommes armés de la sorte, il lui dit que des hommes d’airain sortis de la mer pillaient les campagnes. Le roi,